L'humanité est le lieu d'apparition du Mental dans le règne vivant sur Terre. Cela pourrait nous remplir d'intense jubilation si le résultat n'était pas aussi catastrophique. La chronique des ratages produits par l'être humain se résume à la succession des gestes par lesquels le Mental tente de se dégager de l'univers matériel/émotionnel qui l'enracine dans le Réel, et avec lequel il développe une relation ... disons ... ambivalente. L'énergie Mentale est expansive dans les trois directions de l'espace. Dans son expansion elle rencontre trois sortes d'obstacles, et à chacun de ces obstacles, elle lutte pour retrouver sa pérennité. On peut dire que le mental est orgueilleux dans toutes les directions, et que sa lutte s'applique à l'encontre des trois sortes d'humilités qui font de nous des êtres faillibles, fragiles et sensibles, càd, accessibles à la Grâce.

Le premier obstacle est l'opacité de l'Icône, qui, quoique d'épaisseur nulle, forme un écran infranchissable au rayonnement du Mental. Là, nous rencontrons la grâce du pardon, et le besoin infini d'être aimé, que seul Dieu peut satisfaire. Le Mental étant "infaillible", il n'a pas besoin du pardon. Et étant autonome, il n'a pas besoin de l'amour de Dieu. Il luttera donc contre ces deux obstructions. Il désirera la destruction de l'Icône : le Mental sera nommé iconoclaste. Comme l'Icône est indestructible, cette lutte produit une tension permanente. Le désir d'indépendance est renvoyé au visage du Mental avec une force équivalente à son désir de détruire l'Icône. Telle réverbération est généralement connue sous l'appellation de narcissisme, forme la plus subtile de l'ego.
Le second obstacle est l'étranglement propre au chemin de moindre résistance. Une rivière suit toujours le chemin de moindre résistance. Elle ne décide pas de son parcours. Sa nature est d'aller droit devant. Elle respecte sa nature en accomplissant son but, qui est de rejoindre l'océan. Mais les circonstances - et les circonstances seules - décident de la forme que prendra ce parcours. Cette subordination aux circonstances est, du point de vue du Mental, une restriction insupportable. Le Mental aimerait pouvoir décider à n'importe quel moment de tourner à gauche ou à droite, non par souçi d'efficience, mais simplement pour prouver au monde, et à ses propre yeux, qu'il en a le droit. La perte d'efficience, l'augmentation des frictions, la fatigue, la confusion, le sentiment d'avoir perdu la boussole sont les contrecoups naturels de telle arrogance.
Le troisième obstacle est l'implosion propre à l'essence matérielle. La matière offre la contrainte ultîme, le fait d'exister ici et maintenant alors que le Mental existe partout et toujours. Posséder un corps matériel constitue donc, du point de vue du Mental, l'outrage ultîme. Il luttera de toutes ses forces pour l'annihiler. Il aura l'impression d'être sale, lourd, inerte, impuissant. Cela produit un intense sentiment de claustrophobie, qui pourra confiner, dans les cas de réactions extrêmes, à la folie meurtrière ou à l'autodestruction.
La lutte du Mental contre les trois formes d'humilité génère en contrecoup la cristallisation de ces humilités qui deviennent autant d'obstructions infranchissables. L'humilité n'est pas une obstruction en soi. L'humilité n'apparaît sous forme d'obstruction qu'aux yeux du Mental, parce que son essence est expansive. Cela non plus ne pose intrinsèquement aucun problème. Le problème c'est que le Mental n'accepte pas que les autres parts de l'âme soient retenues. Il désire les réformer. Or vouloir réformer une obstruction pour s'en libérer augmente - par réaction - son opacité. C'est le désir de liberté qui crée l'emprisonnement.
Au-delà du Mental réformateur, dont l'intelligence s'applique relativement aux obstructions, existe le Mental pur, qui se soutient dans la lumière de sa propre résonance, sans prendre appui sur quelque opposition que ce soit. Si le Mental réformateur n'a de cesse que d'annihiler tout ce qui n'est pas lui, le Mental autorésonant, peut très bien coexister avec le corps-âme et se syntoniser à tous ses pouvoirs, afin de les amplifier et d'augmenter leur brillance. Notre choix se résume à ceci : soit nous accédons à ce quatrième état du Mental, soit notre identification égoïque aux trois formes inférieures du Mental nous emporte vers l'abîme de l'autodestruction. Mais ... avons-nous le choix ?
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