Un modèle est dit axiomatique lorsqu'on pose en son centre un ensemble d'axiomes desquels on fait découler, par démonstration, une collection de corollaires. Par analogie, nous pouvons dire du psychisme qu'il possède une structure axiomatique, le Sujet étant l'axiome, et les différentes caractéristiques de la personnalité étant ses corollaires. Chacun de ces corollaires reflètent en partie la lumière du Sujet, puisqu'on peut s'y identifier (on y trouve de l'identité). Mais seul le Sujet possède en propre la vertu d'être Sujet. Nous retrouvons la même idée dans Le Tabernacle des Lumières de Ghazali, où il est dit que seul Dieu possède en propre la vertu d'Etre, la création n'étant participante à cet Etre que par emprunt de Sa lumière essentielle. Hors Dieu, la création n'est que Néant.
En tant qu'axiome, l'existence du Sujet est absolument non démontrable. Cela peut s'exprimer selon deux définitions. La définition positive est l'affirmation que "ce qui est est". C'est la loi n°zéro de Moïse, la révélation que Dieu "Est Celui qui est". Nous retrouvons cette caractéristique dans les atours du Bouddha Tathagata, littéralement : celui par qui il est démontré que ce qui est est. Le point important - essentiel - à retenir au sujet de cette première définition, c'est que l'accès de l'Objet au Sujet - de l'extérieur à l'intérieur - est impossible, inexistant. Le Sujet en "moi" étant indémontrable, aucun élément de ma personnalité ne peut m'y accorder. Seul le Sujet peut, de son propre chef, se révéler à "moi" en tant que détenteur de lui-même. Cela correspond à la "voie de la révélation directe" propre au Dzogchen. Soit le Sujet se révèle et alors il est révélé, soit le Sujet ne se révèle pas, et alors il est inexistant. Zéro ou un, sans intermédiaire. Nous pouvons faire là l'expérience de la certitude, parce que, hors Sujet, rien ne peut nous rendre certain que le Sujet existe, mais du point de vue du Sujet, le fait de sa propre existence apparaît comme absolument indubitable. Nous retrouvons ici l'idée que tout axiome est, par définition, arbitraire (cette dernière idée pouvant être considérée également comme un axiome).

La seconde définition, négative, permet d'utiliser l'axiome du Sujet à des fins pragmatiques. Il s'agit de l'affirmation que "le Sujet est absolument non-Objet". S'il est possible d'objectiver quelque chose, alors ce n'est pas le Sujet. Il s'agit de l'aspect fonctionnel, opérateur du Sujet. Il n'existe pas seulement dans l'auto-résonance de sa lumière essentielle : il existe en outre en tant qu'affirmation de "n'être pas l'Objet". Il s'agit d'une sorte de "répulsion" radiative, d'un rayonnement sphérique qui maintient tous les objets "en-dehors" de son noyau émetteur. "Répulsion" et "en-dehors" sont mis entre guillemets car ils font référence à des mouvements dans l'espace-temps, ce qui est une façon grossière de décrire l'opération du Sujet. L'expérience réelle ressemble néanmoins à cette analogie. Les Pères de l'Eglise parlent de la prière comme étant une colonne de lumière en laquelle les contenus mentaux (logismoï) semblent flotter en état d'apesanteur. Par cette fonction opérative, le Sujet affirme à la fois son identité et son exclusivité - exclusivité dont nous retrouvons la formulation dans le dire du Christ : "Je Suis le chemin, la vérité et la vie, nul ne va à Dieu que par moi".
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